top of page
enfantas planete.jpg

Notre manifeste

  1. Acte de naissance

 

Malgré la catastrophe environnementale amorcée, les décideurs de la planète s’entêtent à accélérer la réalisation de Grands Projets Nuisibles, Inutiles et Imposés. Les règles environnementales, tant européennes que françaises, bien que largement insuffisantes, ne sont pas respectées.

Les grands projets d’aménagement routiers sont décidés en toute opacité, sous le poids des lobbies et sans prise en compte de la parole citoyenne et des capacités d’expertise de la société civile.

La poursuite d’un modèle favorisant l’auto-solisme au détriment des mobilités alternatives, et la volonté de développement du fret, ont un impact réel et considérable sur la qualité de vie, la santé de la population et l’environnement.

Nous résistons et nous réagissons pour  que les routes cessent de détruire nos vies : « Nous sommes la nature qui se défend ».

bd embouteillages.jpg
manifeste deroute des routes 1.jpg
2. Métropolisation, urbanisation

Les projets routiers sont un élément central dans l’expansion des grandes villes, autant pour être reliées entre elles que pour alimenter la logique des flux tendus des marchandises et ouvrir un accès vers de nouvelles vagues d’urbanisation. Les routes sont le front pionnier de la métropolisation.

 

Le mensonge politique des routes

Une route n’est jamais une infrastructure neutre qui suivrait l’évolution naturelle démographique ou économique ou qui répondrait aux besoins de la population. La route induit un mode de vie, fabrique des comportements et crée des besoins. Les routes ne désenclavent pas les territoires, mais livrent de nouveaux espaces à la prédation foncière du privé. Sans route, pas d’urbanisation. La construction d’une route appelle de manière systématique une nouvelle vague d’urbanisation (CNPN, 2021).

Pour rester dans la compétition des métropoles européennes voir mondiale, les villes ont besoin de maintenir une attractivité forte. Avec l’injonction de l’attractivité, on concentre les activités économiques et la population. On attire à tout prix habitants et entreprises. La Métropole est consommatrice d’espaces : elle étale lotissements, zones commerciales et entrepôts.  Ce faisant elle détruit des milieux naturels, paysagers et agricoles et condamne à mort la ruralité :   Beaucoup de terres agricoles sont laissées en friche dans l’attente d’une requalification en terre constructible grâce à l’ouverture d’une route. Cette expansion folle se répète partout : jusqu’où ? Avez-vous déjà vu un périphérique qui ne soit pas encadré de hangars, d’entrepôts ou de barres d’immeubles ? Quand arrêtera-t-on la course à l’artificialisation des sols ?

 

Métropolisation et sectorisation et modèle tout voiture

 

La métropolisation privatise les espaces et les usages communs. Elle marchandise et classe les activités par secteurs spécialisés cloisonnés dans l’espace : lieux de production (zones industrielles), de courses (zones d’activités commerciales), de loisirs, d’habitat et de travail avec des villages transformés en villages-dortoirs.

Les métropoles ont besoin de liaisons rapides entre elles (délaissant le reste du territoire et absorbant toute l’activité en son sein). Elles font miroiter un gain de temps qui permet aux promoteurs de vendre des habitats de plus en plus loin de nos lieux de travail, de vie, de commerce. Elles nous enferment dans une vie centrée autour de la voiture, sans aucune échappatoire. Une vie intenable en terme économique, de temps passé en voiture. Une vie intenable par la catastrophe écologique, climatique qui l’accompagne.

La métropolisation suit une logique extractiviste au sens écologique et social du terme.

​3. Réseau et trafic induit

Mensonge politique de la fluidification du trafic

Les routes sont presque toujours justifiées comme une solution locale pour fluidifier le trafic existant. Or la construction d’une route crée son propre trafic supplémentaire saturant très rapidement. Aucune construction de routes n’a jamais supprimé les embouteillages. Cela n’a jamais marché. Toute nouvelle route incite à aller toujours plus loin et induit une hausse du trafic à moyen terme qui congestionne à nouveau la nouvelle infrastructure entre quelques mois et quelques années. C’est le trafic induit.

Métropoles et Réseau

L‘objectif réel de tous ces projets routiers est d’intensifier réseaux et logistiques. Tous les collectifs de la Déroute des routes en font le constat : en traçant les projets contestés sur une carte nous avons clairement vu qu’ils s’insèrent dans le réseau de transit. La France est un carrefour du transit des marchandises entres les ports de Méditerranée et de l’Atlantique, l’Espagne, les pays de l’Est, pour gagner le Nord de l’Europe. Les projets routiers ne sont pas là pour fluidifier mais pour faciliter le transit régional, national et international de camions par des itinéraires bis. Ils visent à construire des hubs logistiques performants, à la fois proches des villes et connectés aux autoroutes. Chaque route construite a un impact bien plus grand que l'impact local, car elle favorise la logique de transport longue distance et de développement d’activités économiques. Les métropoles sont des grands pôles économiques qui ont besoin d'être connectées les unes aux autres pour faire venir les travailleurs et les marchandises.

 

La métropolisation s’alimente de réseaux tentaculaires, performants et rapides : réseaux routiers, ferroviaires, maritimes, aéroportuaires mais aussi électriques et numériques. Les projets routiers auxquels nous nous opposons dépassent l’échelle locale des politiques car ils sont un maillon essentiel du développement du capitalisme et de l’expansion des réseaux avec toutes les conséquences en chaîne.  

Les réseaux déploient une méta-structure plaquée sur le territoire qui n'est pas à destination des personnes qui y habitent. Elle gomme les particularités des lieux et tend vers l’uniformisation et la croissance illimitée du monde.

4. Démocratie malmenée
 

Les consultations publiques sont de véritables fabriques du consentement.

La novlangue du pouvoir institue le mensonge de la protection écologique et de la participation citoyenne. Le droit de l'environnement aboutit à des compensations économiques qui ne servent pas à protéger l'environnement. Les compensations et les dérogations environnementales obtenues sont en fait des autorisations de détruire l'environnement.

 

Les consultations publiques sont de véritables fabriques du consentement. La verticalité du processus laisse peu de places aux réserves qu’elles soient environnementales ou sociales. Les observations de la population souvent critiques et argumentées, sont consignées selon un processus formel et vertical : après avoir été entendues et partiellement synthétisées, les décideurs justifient les raisons de leur choix en argumentant dynamique territoriale, gains de temps et développement économique. Comme sous l’ancien régime, les pouvoirs s’acquittent des devoirs d’information.

Ils convoquent les sujets, les informent, les écoutent puis décident sans eux.

 

Transparence, accessibilité et clarté des projets font défaut.

Avant, pendant et après la concertation publique, l’information est opaque et conforme à l’impératif du développement économique. La stratégie consiste à éliminer systématiquement toute vision globale et à découper les projets dans le temps et l’espace pour éviter d’analyser les effets cumulés des sections de projets structurant le réseau. Lorsque les contestations vont jusqu’aux contentieux, l’inégalité de moyens financiers, de communication, d'accès aux juristes et avocats ou d’accès aux informations stratégiques, est criante.

 

Les jeux d'influence et le tout-pouvoir d'élus, d’entreprises ou d’autres structures sont omniprésents. Les liens entre les entreprises et les élus se traduisent par une certaine porosité dans le carriérisme politique. Les engagements politiques appellent à changer, mais le virage  pratique pour réduire émissions et artificialisation ne se fait pas. Les avis des organismes environnementaux (missions d’autorité environnementale régionale ou Conseil national de Protection de la Nature) sont consultatifs et sont ignorés des Préfets.

 

La démocratie environnementale est malmenée.

 

Après les réformes des conseils nationaux de l’air, de l’eau ou de la protection de la nature, vient le nouveau mantra de la simplification et de la sécurisation des projets : les contrôles sont allégés et la participation par voie électronique (loi ASAP, 2020) accélère le processus du consentement.  Il faut toujours croître plus vite. Préfets et secteurs privés ont le privilège de définir en amont réglementations et dérogations. Les droits de vivre dans un environnement sain sont bafoués ; ceux qui prennent la parole pour revendiquer les droits du sol, des arbres ou des rivières sont traités d’éco-terroristes. Ces méthodes et ces amalgames nuisent à la démocratie, condamnent les actions citoyennes et contribuent à nous précipiter droit dans le mur. Il est urgent d’arrêter de nier les changements climatiques et urgent de ne pas continuer à répéter le même modèle de développement climaticide !

5. Projets locaux et impacts globaux : climat, biodiversité, pollution, santé, air, eau, sols

 Nous réclamons un moratoire sur tous les projets routiers.

Des scientifiques ont établi que la Terre est habitable seulement à condition que l'on respecte certaines limites écologiques. Le domaine le plus connu est celui du climat, pour lequel le seuil à ne pas dépasser est de +1,5 degrés. Au-delà, on entre dans une zone dangereuse où la biosphère peut basculer vers un état moins favorable aux sociétés et à la vie – dans la diversité que nous lui connaissons. Mais il existe huit autres domaines qui présentent un risque d'effondrement au niveau planétaire : couche d'ozone, particules fines, cycle de l'eau douce, de l'azote et du phosphore, place des forêts, pollutions notamment chimiques, biodiversité, acidification des océans.

 

La politique du tout-routier aggrave la situation non seulement pour le climat, mais pour l’ensemble du vivant. Les projets (auto) routiers sont incompatibles avec le respect des limites planétaires et sont en contradiction avec tous les grands engagements pris par la France à l'international avec l’accord de Paris, et au niveau national avec la Stratégie nationale Bas Carbone, le Zéro Artificialisation Nette et le Feuille de route économie circulaire.  Parce qu'ils portent de graves atteintes à l'écologie et qu’ils ne respectent aucun des engagements pris, nous réclamons un moratoire sur tous les projets routiers. En effet, les projets locaux ont un impact global et nécessitent le changement de politiques publiques.

 

 

Déjà insuffisants pour répondre sérieusement au chaos écologique, les accords internationaux ou nationaux n'ont aucune déclinaison opposable au niveau local. Nulle obligation n'est faite aux collectivités locales et aux acteurs privés de respecter des objectifs chiffrés concernant le climat ou encore la biodiversité. L'État signe donc d'une main des engagements, et de l'autre accorde des permis de détruire et de polluer.

 

De même, les lois de protection des espèces en voie de disparition et des milieux fragiles ne sont que de la poudre aux yeux. La seule obligation qu'elles engendrent est de faire des démarches bureaucratiques, qui aboutissent systématiquement à l'autorisation de détruire. Le cynisme du système est à son comble puisque ce blanc-seing pour l'écocide s'appelle une « autorisation environnementale ».

 

Les puissances publiques l'affirment la main sur le cœur : leurs projets (auto) routiers sont climato-compatibles. L'entourloupe vient du fait qu'elles comptent sur le remplacement des véhicules thermiques par des électriques. Ce présupposé sur lequel elles basent tous leurs calculs de pollutions est mensonger à plus d'un titre. D'une part, les industriels sont les premiers à le dire : ce remplacement est impossible, il n'y a tout simplement pas la matière nécessaire pour produire toutes les batteries et l’extraction des métaux rares ravage l’environnement. D'autre part, la production d'électricité émet des GES, qu'il s'agisse de toute l'énergie nécessaire à l'extraction et au transport de l'uranium, à la construction et au démantèlement des centrales, au transport et à l'enfouissement des déchets, etc. Par ailleurs, l’usure des freins et des pneus est la première source de particules fines, d’où des niveaux comparables de pollution peu importe l’énergie utilisée par le véhicule. Ne nous laissons pas berner : les projets (auto)-routiers sont des crimes climatiques, et la voiture électrique n'est qu'un moyen très sûr de continuer à foncer dans le mur. La protection des milieux  et la défense des vies ne passe pas par une gestion des pollutions, mais par une réduction de la cause des destructions environnementales : le trafic.

 

Les pouvoirs publics éludent systématiquement une grande partie des conséquences néfastes des projets routiers sur le climat :

 

Car ces projets accélèrent le chaos climatique non seulement par le trafic qu'ils engendrent, mais aussi par la destruction des milieux qui stockent du carbone. Si les études d'impact comptabilisent souvent la contribution des arbres (donc le CO₂ rejeté par leur abattage), elles omettent celle, tout aussi importante, des sols qui sont également détruits par ces projets. Le remplacement de ces sols par de l'enrobé a également un autre effet sur le climat : sa surface sombre diminue l'effet d'albédo (le renvoi des rayons lumineux vers l'atmosphère), ce qui augmente le réchauffement.

“Nous devons exiger que plus rien ne soit détruit ET que des milieux soient restaurés et protégés.”

 

Les impacts sur la faune et la flore dépassent très largement la destruction directe engendrée par les travaux. La biodiversité est également impactée par l'augmentation de toutes les pollutions (de l'air, du sol, de l'eau, mais aussi sonore et lumineuse). Elle l'est encore plus par les destructions ailleurs qui sont facilitées ici par l'augmentation des réseaux routiers, donc de toute la chaîne de transports.

 

Le morcellement des habitats laisse au sauvage des espaces réduits à peau de chagrin. Il engendre ce que les humains appellent des risques de collision, et qui pour les animaux sont un carnage quotidien, quand ils tentent de traverser les routes qui balafrent leur territoire. L'aménagement de passages est de la poudre aux yeux. Il ne compense en rien la démultiplication des frontières que sont les réseaux routiers pour les animaux.

L'ensemble des mesures de compensation sont du même acabit. Elles sont basées sur un mythe comme quoi on pourrait contrebalancer la destruction d'un milieu par la protection ou la réhabilitation d'un autre. Il s'agit d'une vision gestionnaire et comptable du vivant, qui permet le green washing le plus éhonté. À l'heure de la 6ème extinction, ces négociations mesquines sont inacceptables : nous devons exiger que plus rien ne soit détruit ET que des milieux soient restaurés et protégés.

 

La santé des écosystèmes et celle des humains ne font qu'un, et sa sauvegarde passe par l'abandon des projets (auto) routiers. L'objectif de sécurité souvent brandi par les porteurs de projet est un miroir aux alouettes. Les routes nouvelles ou réaménagées ne font qu'augmenter les problèmes de santé de la population et la mortalité précoce. Elles aggravent la pollution de l'air, qui provoque 67 000 morts humains par an en France. Le véhicule électrique ne répond pas non plus à cet enjeu, car 40 % des particules d'une voiture sont émises par l'usure des pneus et des plaquettes de freins. Ces projets créent toujours un appel d'air qui engendre du trafic supplémentaire, donc une augmentation des pollutions. Des pollutions supplémentaires sont générées tout au long du cycle de vie d'une route : par les véhicules qui l'emprunteront sur l'ensemble de cette durée, mais aussi en amont lors des chantiers. Les études d'impact nient systématiquement ce phénomène pourtant largement connu et démontré.

 

Les aménagements et créations de routes génèrent des accidents, du fait qu'ils augmentent le trafic, et facilitent l'usage de la voiture comme mode de déplacement et du camion comme mode de transport des marchandises. Et en le facilitant, ils le promeuvent, et renforcent la culture virile de la voiture, qui est une cause centrale des comportements accidentogènes.

Une véritable politique de sécurité ne passe pas par la fluidification du trafic, mais par la remise en cause profonde de la place de la voiture dans nos territoires et de sa signification dans notre société patriarcale.

 

La route tue davantage que toutes les guerres et toutes les attaques terroristes. Elle tue à cause des pollutions qu'elle engendre, des accidents qu'elle génère, sans même compter sa contribution au chaos climatique et aux autres effondrements environnementaux, dont le nombre de victimes présentes et à venir est incalculable.

6. Coûts

 

18 milliards d’euros pour 55 projets routiers destructeurs dont plus de 12 milliards d’investissements publics, c’est beaucoup (Reporterre, mai 2022).  Mais ce n’est pas tout, car ces coûts sont largement sous-estimés.  En effet, les coûts retenus sont ceux qui figurent dans les études préalables aux déclarations d’utilité publique.  Impossible de savoir si les chiffres communiqués incluent ou pas la taxe sur la valeur ajoutée et les frais des études d’impacts. Impossible d’accéder aux contrats de concession des projets autoroutiers, placés sous le sceau du secret privé.

 

L’opacité est la règle.  

 

Les coûts transmis au public n’incluent ni l’actualisation, ni l’inflation, ni les coûts réels. Les calculs se cantonnent à l’emprise de la route sans prendre en compte les coûts liés. Ils n’internalisent pas les destructions environnementales hors-mis les compensations pour les espèces protégées : le vivant ordinaire échappe aux calculs. L’information est incomplète et biaisée puisque les méthodes de calculs n’intègrent que très partiellement les critères qui pourraient permettre d’estimer les coûts intégrant environnement et santé humaine.

 

Impossible donc d’estimer dans ces conditions les coûts effectifs des projets routiers. Mais ils coûtent chers, très chers. A cela s’ajoutent les coûts de l’entretien des routes qui s’élevaient à 14 milliards d’euros en 2020 selon Routes de France. Pour faire face à ces frais de plus en plus élevés et largement incomplets et sous-estimés, l’Etat transfère les compétences et les financements aux autorités territoriales et au secteur privé.

Pour les opérateurs, l’heure n’est ni à la réduction du trafic, ni à la diminution du calibrage des infrastructures.

Il s’agit plutôt de sur-dimensionner les chantiers et de gagner des marchés captifs et sécurisés par des contrats négociés en amont avec l’Etat et les autorités territoriales. Les retours sur investissements sont garantis et la sur-rentabilité est notoire : ainsi, les sociétés concessionnaires d’autoroutes ont vu leurs résultats augmenter de plus de 64% entre 2021 et 2022 (Canard Enchainé, 2023).

 

Diminuer le trafic routier et reporter les coûts des projets routiers destructeurs vers des mobilités douces est une évidence économique, sociale et environnementale.

 

Mais économiquement, et politiquement, cela suppose que le gouvernement modifie ses politiques contractuelles avec le secteur privé. Tant que les politiques publiques n’opèrent pas une révolution dans les choix de modes de transports (90% du trafic de marchandises et de personnes se fait par les routes en France) et dans les relations clientélistes entretenues avec le privé, les investissements pour la construction et la rénovation des infrastructures routières s’additionnent : capital et croissance économique poursuivent leurs ravages.

“La politique de la terre brûlée”

 

La politique de la terre brûlée, d’une gestion au cas par cas et au court terme doit cesser, car elle nous conduit droit dans le mur. Notre demande de moratoire a un sens économique, environnemental, social et politique.  D’autres pays, font le virage à 180 degrés et n’hésitent pas à geler les projets routiers pour mettre la priorité sur les transports en commun, le ferroviaire, le vélo, la marche à pied. Pays de Galles et Pays Bas investissent dans le futur en favorisant des mobilités qui améliorent santé, climat et biodiversité. La Suisse a choisi depuis longtemps le fret ferroviaire pour le transfert de marchandises. Qu’attendons-nous ?

7. Alternatives

 

Lutter contre le modèle tout-routier est une bataille culturelle. Il nous faut démonter le mythe de la mobilité heureuse, d'une mobilité choisie et émancipatrice, mythe sur lequel prospère ce modèle. Pour les individus, la mobilité réelle est au quotidien une contrainte, contrainte de se déplacer loin et/ou longtemps pour tous les moments d'une vie fragmentée dans l'espace (se déplacer pour aller travailler, faire des courses, se divertir, déposer les enfants à l'école... et rentrer chez soi). La voiture comme outil de liberté est un leurre publicitaire. Sa réalité pour l'individu c'est l'embouteillage, les galères de stationnement, le coût d'achat et d'entretien, etc. 

La circulation des marchandises répond quant à elles aux besoins d'un système productiviste bâti sur la croissance économique. On produit loin pour plus de profits et de rentabilité, puis on déplace les marchandises.   

 

L'objectif à terme est donc de réduire massivement les déplacements des gens et des marchandises et de repenser nos façons d’habiter, de produire et de consommer. Pour y arriver, il nous faut sortir de la vision technique et normalisée des catalogues de mesures.  A la recherche de modèles de société alternatifs et de changements de modes de vie, les chemins sont à inventer. Selon les endroits, les solutions alternatives peuvent être différentes, notamment entre ville et ruralité, entre centre-ville et quartiers périphériques relégués, etc. Partir des besoins réels des gens, spécifiques à chaque territoire et à leur contexte, discuter, expérimenter.  La mise en commun des expériences locales et de leurs contextes ouvre de nombreux des points de débats, qu’il s’agisse des taxes sur les poids lourds, d’aménagements complémentaires ou des priorités entre mobilités douces, relocalisation du travail, création de lieux de sociabilité, etc.  Sans chercher à trancher, il s’agit d’imaginer les possibles et ce faisant d’inverser en somme le modèle du tout-routier qui plaque sur nos vies une méta-structure dévorante.

Pour requalifier l’existant, nous pouvons par exemple, pirater la séquence Eviter-Réduire-Compenser préconisée par les normes environnementales, en l’appliquant à l’envers :

 

Dans l'urgence, compenser :

Densification de l'offre de transports en commun, avec l'extension de leur gratuité et une multiplication des fréquences et des connexions, notamment de périphéries à périphéries, pour que les transports ne soient plus conçus seulement pour desservir les centres.

Facilitation du vélo (multiplication des pistes cyclables), de la marche (espaces dédiés), du covoiturage (les parkings pourraient être des endroits conviviaux avec des cafés, etc.)

 

A court terme, réduire :

Faire un état des lieux des besoins précis des gens pour leur mobilité par des enquêtes de terrain indépendantes

Mener des réflexions sur le travail et ses modes

Fermer des voies à l'auto-solisme pour les réserver aux usages collectifs : transports en commun, covoiturage.

Maintenir l’exister et obliger les aménageurs à mettre en balance leurs projets routiers avec des projets de déplacement alternatifs au routier (dont l'option de ne rien changer à l'existant)

 

A moyen terme, éviter :

> Relocaliser le travail 

> Relocaliser les services (santé, administratif, écoles...) et les commerces dans les villages et les périphéries

> Recomposer les villes autour de quartiers "autosuffisants" (à l'opposé de l'actuelle sectorisation par activité)

> Accompagner l'installation et la relance des productions locales (agricoles et autres) : financement, aides à l'installation, mise à disposition de matériel et locaux, etc.

 

Ces propositions visent toutes à réduire nos déplacements et à repenser nos modes de vie. Elles obéissent à un impératif de vie :  arrêtons la destruction des ressources naturelles.

8. Défendre les communs

Nous sommes la              « nature qui se défend »

 

Nos institutions sont comme des machines lancées à corps perdus suivant l’unique mode d’emploi du développement et de l’exploitation des ressources naturelles. Des séries de dispositifs juridiques pratiques encadrent la décision froide de l’administration. Le droit de l’environnement est balayé par le droit administratif :  l’utilité publique d’un projet se mesure à l’aune du seul développement économique.  Ce n’est pas parce qu’un projet est réglementaire qu’il est juste et légitime, ni qu’il œuvre pour l’intérêt général. Comment une décision réglementaire peut-elle être supérieure à notre survie et à celle du vivant ? Les dispositifs tournent, entièrement occupés à gérer les indicateurs de performance utiles pour leur propre survie et oubliant le vivant.

 

Nous sommes la « nature qui se défend », et dénonçons les lois dépassées par l’histoire.

Bloquer les projets routiers, est un axe stratégique clé pour empêcher la destruction du vivant : les  ressources humaines et non humaines sont limitées ! C’est par les luttes que les droits se sont constitués et c’est par les luttes que nous devons continuer à résister pour faire valoir ce qui est vital. Notre eau, notre air, les espaces naturels riches de biodiversité, les terres agricoles sont des communs qu’il nous faut défendre.  Recréer des communs, de l’interdépendance, c’est se réapproprier des manières vivantes d’être ensemble.

democratie.jpg
DSC07660.jpg
560x315_sc_20230322-131540.jpg
Image6.jpg
Image7.jpg
bottom of page