Tribune : Les carrières, les berceaux des routes
- sosoulala
- 23 avr.
- 3 min de lecture
Le 23 avril 2025, le Collectif Carrière Tahun
A l'heure des Déroutantes, la Déroute des Routes s'ouvre aux collectifs sans bitume. Nous publions ce jour la tribune du collectif Carrière Tahun qui explicite les liens carrières et route. Béton, Macadam, Logistique, Routes, Carrières se connectent :
"Si comme le dit l'adage, toutes les routes mènent à Rome, on pourrait aussi dire que toutes les routes commencent dans les carrières. Effectivement ces dernières sont les berceaux de l'artificialisation des sols et les tombeaux des excès du capitalisme".
Routes, granulats et camions : le capitalisme circulaire
"En France, on compte plus de 4 300 carrières. Elles produisent des roches ornementales, des minéraux industriels (talc, gypse, calcaire, andalousite, kaolin, sable siliceux, diatomite, etc.) et surtout des granulats (gravier et sable). La production annuelle de granulats est de 400 millions de tonnes. Les granulats entrent dans la composition de divers matériaux liés ou non (béton, macadam, et ballast de remblai), destinés à la construction d'ouvrages de travaux publics, de génie civil et de bâtiments.
Les 400 millions de tonnes de granulat annuels sont transportées par plus de 10 millions de camions de 44 tonnes. La zone de chalandise se situe en moyenne dans un rayon de 50 km. Rien que dans le transport, le coût énergétique et écologique est colossal.

Ajouter à cela qu’un camion use un million de fois plus une route qu'une voiture classique. En clair, la maintenance des routes est faite par ceux qui les détériorent et justifie en bonne partie leurs activités. Ce n'est pas de l'économie circulaire mais du capitalisme circulaire. Plus il y aura des carrières pour faire ou pour réparer des routes, plus il y aura besoin de nouvelles carrières pour réparer ces routes ou faire d'autre tronçons pour les supporter.
Valorisation versus un extractivisme illimité
Comme le dit Nélo Magalhães dans l’ article de Médiapart " L’extraction de ces matières, de très loin la plus importante du pays, est aujourd’hui destinée à plus de 80% aux travaux publics, et en particulier l’entretien des routes. C’est un véritable cercle vicieux, qui se poursuit tant que cet usage-là de l’infrastructure prédomine"(juin 2024).
La réduction de l'artificialisation des sols aurait dû s'accompagner d'une baisse de la production de granulats, mais il n'en est rien. S'il est possible d'introduire dans des lois de fausses intentions sous des couches d'enrobés, rien ne semble arrêter les industriels dans leur production. Ils veulent faire carrière et écraser le destin des vivants.

Les carrières sont aussi utilisées pour y enfouir les déchets du BTP. Cette pratique qui consiste à boucher des trous est considérée au titre de la valorisation. Avec un taux de 70% de valorisation, les carriers développent une économie très lucrative. L'Etat quant à lui se vante d'atteindre les objectifs européens. Un recyclage réel et au plus près des chantiers éviterait extractivisme et transports associés. Mais là aussi il n'en est rien, car le circuit financier le plus avantageux prime.
Arrêtons la destruction des sols et du vivant
Ces carrières en activité occupent un peu plus de 0,2 % de la surface de la France (soit 1 166 km²) et en 2022, 20 276 hectares ont été artificialisés avec les matières issues de ces carrières. Ainsi que ce soit dans les lieux de production ou lieux de consommation, il y a une dégradation irréversible des sols et du sous-sol (décapage, extraction, abattage, terrassement) et une transformation du relief. Le monde est mis à plat pour faciliter la circulation et faire dans les nœuds de réseaux routiers de vastes entrepôts logistiques.
Notre coalition d’associations lutte contre les ouvertures ou les extensions de carrières, de sablières, de gravières est en train de faire chemin. Par nos mobilisations et nos mots, sans bitume, sans béton, sans granulat, sans gravats, nous faisons un tour dans les contrées voisines et amies. Merci à la Déroute des routes : une route en moins, c'est peut-être une carrière en moins. Nous prenons la même voie mais dans l'autre sens : nous luttons pour l'évitement de ces lieux d'extractions là où la biodiversité et l'eau sont détériorés et aussi pour que la production qui en résulte ne détruise pas de la même manière les lieux de destinations."
Le Collectif Carrière Tahun, le 23 avril 2025
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